Lors d’un récent forum, le financier George Soros a exprimé ses craintes sur l’économie mondiale et les spéculations sur la dette. Les marchés financiers ont commencé dans le rouge vif cette année, le modèle chinois étant mis à mal par des indicateurs décevants. L’Europe peine à sortir de sa léthargie. Si les Etats­Unis affichent des chiffres positifs, ils sont à relativiser compte tenu des performances historiques à ce stade du cycle économique.

Plus jamais les subprimes…

Revenons 8 ans en arrière. En 2008, le monde semble être au bord du gouffre. Le système bancaire menace de s’effondrer et les Etats sauvent les grandes banques. Ceci était le résultat d’une politique moné­ taire où le cash abondait sous le monopole de la banque centrale diffusant son crédit via les banques privées qui en démultipliaient la portée.

Mais la monnaie nouvellement créée (il ne s’agit pas d’or ou d’argent extrait à la sueur du front des banquiers) devait trouver un emploi. Les politiques laxistes en matière d’octroi de crédits aux Etats­Unis ont permis de cibler des emprunteurs à risque.

L’idée était que le bien hypothéqué s’apprécierait pour rembourser le créancier en cas de défaut. C’étaient les emprunts subprimes diffusés via des titrisations (transfert du rendement et du risque sur des tiers). Une fois les emprunteurs en défaut, les biens saisis sont venus inonder le marché entraînant une chute brutale des prix. On se souviendra de la faillite retentissante de Lehman Brothers ainsi que des nombreuses saisies hypothécaires.

En 2008, nombreux furent les acteurs qui saluèrent les sauvetages ainsi que la politique « courageuse » des banques centrales. Elles étaient en fait les pompiers pyromanes car à l’origine de la création de la bulle spéculative. En ont­elles tiré des leçons pour autant? Loin de là.

Un modèle insoutenable

Glorifiés, les banquiers centraux sont entrés dans une nouvelle ère d’inflation monétaire en se positionnant à la reprise d’actifs aussi pourris que des obligations grecques ou encore des emprunts municipaux. On relève même des actions dans leurs bilans (est­ce bien le rôle d’une banque centrale?).

Il est à noter que la banque centrale, organe financé par des fonds publics, agit en tant qu’agence de nationalisation de l’économie, s’appropriant des actifs au fil du processus de création monétaire tout en en faisant supporter le risque par la communauté. Est­ce bien moral?

Le credo des banquiers centraux repose sur leur haine des taux d’intérêt, symboles selon eux d’un frein à la croissance et d’une rémunération injustement perçue par l’épargnant (même si ce dernier a travaillé dur et a payé impôts, taxes et dépenses de consommation).

C’est une conception erronée de l’économie qui, dans son énonciation correcte, doit naturellement accepter l’accumulation de l’épargne, qui prendra la voie de l’investissement vers les entreprises rentables. A contrario, la monnaie imprimée par les banques centrales ne constitue qu’une épargne fictive prête à tout moment à s’effondrer comme un château de cartes.

Le monopole de l’émission de monnaie permet aux emprunteurs les plus proches de la source de bénéficier de taux bas, accroissant leur endettement. Les banques privées préfèrent financer les États via des sommes colossales plutôt que financer l’économie réelle. PME et indépendants ne trouvent pas de crédit tandis que les grandes entreprises proches des banques privées profitent de conditions ultra­favorables. Ceci est le résultat d’un monopole d’Etat: celui de la création monétaire confiée à un organisme étatique telle que la banque centrale. Ce modèle n’est pas soutenable.

La suite…

La suite, essayons de l’envisager ensemble. Les États au bord du gouffre, incapables de respecter leurs budgets et de financer leurs dépenses, n’auront d’autres choix que d’envisager une confiscation indirecte de l’épargne réelle via la procédure de ‘bail in’ (recapitalisation des banques par saisie des dépôts). D’ailleurs, le mouvement vers la dématérialisation de la monnaie les aidera en ce sens.

Dans une situation de détresse, les banques centrales tenteront à nouveau de « sauver » l’économie en créant de la monnaie. Mais dès que la demande de monnaie fiduciaire s’effondrera sur fond de méfiance du public, l’inflation partira à la hausse et enverra les taux d’intérêt vers des niveaux stratosphériques.

Vous pensez que c’est impossible? Les descendants des Allemands vivant dans les années 1920 en ont encore les récits effrayants.

Les habitants actuels du Zimbabwe le vivent en direct. Êtes­vous prêt pour une réforme en profondeur du système ou attendez­vous son effondrement?

 

Patrick Smets

Président du Parti libertarien

Paru dans L’Echo  : http://urlz.fr/31t7